mardi 29 janvier 2008

Libéralisme

Bon, et si on parlait politique, pour de vrai ce coup-ci.
Oui je sais, il était temps, tu l'as pensé tellement fort que je l'ai presque entendu : "Il est bien gentil à nous dire qu'il vote Bayrou et à nous sortir la critique du communisme la plus clichée de l'univers, mais c'est quoi ses idées à lui ?".
Je vais, dans cet article, essayer de poser les bases et rappeler quelques définitions de mes convictions politiques. Tu sauras ainsi à quoi t'en tenir.

En France, patrie des 35h et du Front Populaire, je pense pouvoir être catalogué comme centriste, voire centre-droite ; aux États-Unis je serais sans doute considéré comme démocrate ; en Chine je serais probablement pendu haut-et-court.
Personnellement, je me définis comme un libéral modéré.

Libéral car j'estime que de toutes les valeurs qui peuvent fonder la base de principes politiques, la liberté est la plus importante. Je crois que l'État doit avoir sur nos vies le moins d'influence et de pouvoir possible, que c'est à chacun de se battre pour lui et les siens et de se démerder pour s'en sortir par lui-même, ou aidé des gens qu'il a choisi.
Je crois aux principes de liberté individuelle, de libre concurrence et de libre entreprise. Je veux croire qu'on peut adapter le "laissez-faire" économique pour approcher une égalité des chances.

Modéré car je suis réaliste et conscient des failles d'un système purement libéral. Le libéralisme a besoin d'être encadré, limité, sécurisé (même si plus j'en apprends sur cet encadrement et ses effets pervers, plus je remets en question cette croyance).
Modéré également car j'ai mes propres conceptions de certains principes libéraux qui diffèrent sans doute légèrement de la vision puriste. D'ailleurs, je ne prends aucune doctrine vraiment au pied de la lettre, trop attaché que je suis à prêcher la pensée critique.
Modéré encore car je rejette farouchement tout ce qui peut s'approcher, par la droite ou par la gauche, d'une politique extrémiste. Le nationalisme me rend à peu près aussi nauséeux que le communisme. Je me ferai un plaisir de donner mes raisons (sérieusement cette fois) dans un article ultérieur mais je ne vais pas m'étendre là-dessus.

Bon, vu que tu regardes un peu trop la télé où on te dit plein de conneries, pour toi libéralisme ça doit rimer seulement avec droite, États-Unis, Sarkozy et golden parachute, donc on va revoir un peu les fondamentales.
Étant donné qu'on a affaire à une notion assez complexe basée sur tout un tas de concepts trop nombreux et délicats pour que je les détaille tous ici, je vais faire dans le résumé expéditif ; donc si tu veux te cultiver pour de vrai, je te renvoie au portail du libéralisme sur Wikipedia.

Le concept de base, c'est que l'état doit avoir le moins de pouvoir et d'influence possible, qu'il doit juste assurer les fonctions dans lesquelles il est indispensable (police, armée...). Pour simplifier presqu'outrageusement, un libéral c'est un anarchiste favorable au libre marché et à la propriété privée, et qui, dans l'acceptation classique, accepte qu'il faille quand même un pouvoir, quelques lois et quelques institutions nationales.
En France, le libéralisme se situe plutôt à droite en ce qui concerne les questions économiques et le gros des questions sociales, et à gauche sur tout le reste (sécurité, mœurs, immigration, répression...).
Pour entrer un peu plus dans le détail, le libéralisme repose sur de nombreux principes enchevêtrés les uns dans les autres en une interdépendance qui forme un tout cohérent. Je vais tâcher d'énumérer et de te donner mon interprétation des principaux.

Le premier et le plus important c'est la liberté, plus concrètement les libertés individuelles, aussi appelées droits naturels. Ce sont ces fameux droits naturels qui, après avoir tant fait couler d'encre aux lumières, ont fondé les diverses déclarations des droits de l'homme et qu'on retrouve comme bases de la plupart des vraies démocraties actuelles.
Pour faire simple, ils stipulent que chaque individu devrait être libre de disposer de son corps et de ses ressources pour faire ce que bon lui semble, tant qu'il n'entrave pas la liberté d'autrui. De cet aphorisme peut être déduit l'ensemble des fondements du libéralisme que je m'efforcerai de détailler ici.
Tu comprendras qu'en ce sens, je me gausse narquoisement quand j'entends Sarkozy taxé de libéral après ses "exploits" en tant que ministre de l'intérieur, ou des Américains s'auto-congratulant d'habiter le Pays de la Liberté alors qu'on peut s'y voir interdire, suivant les états et sous peine d'amende, certaines pratiques sexuelles considérées comme étant contre-nature comme la sodomie, ou même certains mots jugés trop vulgaires.

Un autre de ces concepts, auquel on réduit malheureusement trop souvent le libéralisme en général, est l'idée de libéralisme économique. Ce concept englobe notamment la libre entreprise, la libre concurrence, le "laissez-faire" économique (intervention minimum de l'état au niveau de l'économie), le capitalisme (propriété privée des moyens de production) et le libre marché (prix libre fixés par le libre débat entre le vendeur et l'acheteur). L'application dans les grandes lignes de ces principes a posé les bases de l'économie de marché que nous connaissons aujourd'hui.
À tort ou à raison, il s'agit sans nul doute du volet le plus critiqué de la philosophie libérale. Le fait est que le libre marché et le capitalisme ne sont pas sans poser certaines problématiques dans leur application pratique, même si la tendance médiatique est, dans une mesure difficilement appréciable, à la surestimation de la responsabilité du système économique libéral et à l'occultation parfois totale de celle de l'intervention constante et souvent nocive de l'état. Reste qu'à ce jour, aucun autre système n'a su proposer de meilleur levier de création de richesses dans la pratique, et que les quelques tentatives historiques d'application de principes contraires furent généralement désastreuses.

Le troisième principe, auquel je tiens beaucoup, est l'individualisme. Il s'agit tout simplement de donner la priorité au bien-être de chacun des individus sur l'intérêt général de la masse.
On a bêtement tendance à confondre individualisme et égoïsme. Les deux n'ont pourtant rien à voir. Contrairement à l'égoïsme à vue courte, l'individualisme n'implique pas le rejet de la solidarité, juste sa non-obligation. Dans un système libre et individualiste, celui qui s'en sort peut aider celui qui galère, ça ne lui est pas interdit ; ça ne lui est juste pas imposé. Ça ne nous empêche pas de se serrer les coudes entre amis, en familles, d'aider ou d'être aidé de ceux qu'on a choisi. On ne vient juste pas nous ponctionner arbitrairement nos ressources durement gagnées pour assister ceux qui n'ont pas réussi à en obtenir et qui finissent par considérer cela comme un dû.
Notre société a l'air de penser que chacun doit aider l'autre, que ceux qui s'en sortent, qui réussissent socialement et professionnellement dans la vie, ont non seulement le devoir moral et légal d'aider ceux qui ont moins de chance (ou moins d'aptitudes, ou moins de courage) mais devraient en plus culpabiliser de rester plus riches qu'eux.
Je préfère que l'acte de solidarité, voire de charité, reste ainsi un acte positif, preuve qu'on est quelqu'un de bien, plutôt que la normalité et la base. Je préfère que ceux qui s'en sortent puissent avoir la satisfaction d'avoir construit leur réussite par eux-même plutôt que par l'assistanat. Et bien entendu, j'aimerais que ceux qui ne s'en sortent pas ne puissent s'en prendre qu'à eux-même.
L'individualisme est à mon goût le meilleur garant de la responsabilisation et de la performance individuelle.

Le dernier point que je développerai ici, trop souvent négligé voire oublié, est le concept d'égalité des chances. Pour pouvoir vraiment responsabiliser l'individu, qu'il soit réellement garant de ses propres réussites et surtout de ses propres échecs, il ne faut pas que le système lui mette de bâtons dans les roues. Tout comme la liberté et l'égalité absolues, l'égalité totale des chances est une utopie, ne serait-ce que parce qu'on naît tous avec des caractéristiques qui nous avantagent ou nous désavantagent par rapport à nos contemporains (apparence physique, facilités intellectuelles, maladies congénitales...). Néanmoins, on peut tenter de s'en approcher. Mais évidemment, cela demande de lourds compromis sur les autres principes.
La recherche de l'égalité des chances est un facteur décisif de la détermination des rôles de l'état et de la nécessité d'un minimum de socialisation (éducation, santé...) dans un système libéral, et donc un des principaux points de divergence des divers courants libéraux. Tandis que les libéraux de gauche en font un point central, qui pousse même certains à renier l'utilité générale de l'héritage et du don, les anarcho-capitalistes rejettent toute imposition de ce concept par des moyens coercitifs, comme un impôt obligatoire.

Enfin, même si nombre de libéraux appuient essentiellement leurs convictions en la matière sur les droits naturels des êtres humain, mon approche vise uniquement à promouvoir auprès du plus grand nombre la possibilité de l'accès au bonheur. Cela implique de prendre en compte des facteurs autres que purement économiques et objectifs. C'est aussi pour cela qu'il n'existe pas de solution générique à tous les problèmes que nous connaissons, quels que soient la complexité ou les bonnes intentions des principes sur lesquels on s'appuie. Une seule doctrine, qu'elle soit politique, religieuse ou économique, ne peut pas suffire à nous donner toutes les réponses. C'est juste une grande ligne de conduite dont il faut s'inspirer et qu'il faut pouvoir modifier et adapter aux situations concrètes. Mais, dans cette optique, l'intérêt d'un système vraiment libéral se démarque en n'interdisant pas aux individus qui le souhaitent de se soumettre réciproquement à d'autres règles afin de mettre en place, pour ceux qui les auront choisis, d'autres systèmes. Ainsi, dans un système libéral, une communauté de socialistes pourra tout à fait se contraindre, par un contrat librement accepté de tous ses contractants, à une cotisation visant à acquérir des biens publics partagés (assurance maladie, revenus minimums...). En revanche, dans un système socialiste, les libéraux n'auront pas le choix de se soustraire à l'impôt et aux lois contraignantes.

lundi 21 janvier 2008

Rejet de l'intelligence

Tu as déjà dû remarquer le mépris certain dont fait preuve notre société actuelle face à l'essentiel de ce qui pourrait s'approcher d'une manifestation d'intelligence. Tu as d'ailleurs sans doute participé, dès ta plus tendre enfance, à cette lapidation générale en affublant l'un ou l'autre de tes camarades du dégradant qualificatif d'"intello" par exemple.
J'ai d'ailleurs peine à croire qu'un diminutif du terme intellectuel puisse être ainsi employé comme une insulte sans un certain sens du second degré et une quelconque auto-dérision dénotée, comme souvent dans le cas de celui qui utilise un compliment comme une insulte, d'une conscience aigue de ses propres limites. Et pourtant non, dès l'enfance, l'intelligence est honteuse et avilissante, tantôt mise au rebut ou sujet d'humiliation. Ce n'est pas par jalousie qu'on se moque des intellos, c'est juste comme ça, par cruauté infantile, par les mêmes mécanismes morbides qui poussent les moins bien élevées de nos têtes blondes à se moquer d'un handicapé lorsqu'ils en croisent un pour la première fois.

Heureusement en grandissant ça s'arrange. C'est peut-être dû à la maturité, ou tout simplement au fait qu'on finit par séparer les belligérants. Ceux qui avaient un respect, même lointain et émoussé par les railleries, pour l'intellect et la connaissance, se retrouvent massés dans des beaux lycées généraux et les autres finissent par aller un peu où ils peuvent.
Mais laissons de côté les enfants pour le moment. On leur pardonne trop facilement tout et n'importe quoi pour que je m'acharne sur eux plus longtemps. Ce n'est d'ailleurs sans doute même pas leur faute, mais celle des parents de quelques-uns, à qui je ne peux même pas en vouloir. Quand on passe sa vie à trimer sur des chantiers ou dans des ateliers, il n'est en effet pas aberrant qu'en regardant par la fenêtre des bureaux où des pingouins en costard gagnent trois fois notre salaire en semblant ne rien foutre derrière un bureau climatisé, on développe une certaine rancœur, injuste et mal-placée mais terriblement compréhensible, envers le respect de l'intelligence en général. La transmission de ce sentiment à sa progéniture n'est à mon goût qu'une autre erreur tout aussi compréhensible et naturelle, et cet instinct malsain qui pousse tous les enfants à se précipiter sur le moindre sujet de moquerie qui leur tombe sous la main suffit à faire le reste du boulot.
Non, ma cible du jour n'est pas la descendance de la France ouvrière et prolétaire (c'est sans doute aussi valable pour l'Angleterre, l'Allemagne ou les États-Unis mais je prends les exemples que j'ai sous le nez). Ma cible c'est certains de ces jeunes, sinon de mes amis au moins de ma connaissance, a priori issus comme moi d'une classe sociale relativement aisée.

Pour aider à situer le contexte, je dois dire que ton serviteur, peut-être par réaction contre la tendance actuelle, due aux messageries Internet et autres blogueries, qui nous pousse à écrire comme on parle, cherche plutôt à tenter de parler comme il écrit. Cette saine prétention, car un peu d'originalité n'a jamais fait de mal, surtout quand il s'agit de traîter avec le peu de dignité encore dû à son égard notre belle langue française, me vaut couramment de dépasser la limite communément admise dans le vocabulaire courant du français moyen des trois syllabes par mot.

Bref, pour avoir osé employer autour d'un feu sur une plage le terme vaguement scientifique de "gravité", voilà que je me vois lancé un "Ho arrête de sortir ta science!". Et les cinq ou six convives présents de rire de moi de concert pour avoir employé un terme un poil trop intellectuel.
Je suis a priori autant qu'un autre la cible de railleries plutôt plus que moins bon enfant (comme c'était d'ailleurs le cas à ce moment) et je ne m'en offusque pour ainsi dire jamais vraiment. Mais voir cette poignée de mes connaissances, tous bacheliers et engagés dans des études supérieures, tous arborant fièrement de beaux vêtements exotiques ou encore de marque dus au seul travail intellectuel du papa commercial ou avocat et de la maman médecin ou professeur, riant oisivement sur la plage grâce aux années d'étude et à la soif de connaissance de leurs fiers géniteurs, d'un signe même lointain et impertinent d'une vague forme d'intelligence, ça m'a profondément affligé.
Ce n'était pourtant pas qu'un seul d'entre eux n'ait pas compris ce que je voulais dire ou un des mots que j'employais. Qu'est-ce donc que ce foutu mépris qui pousse les gens à paraître en société le plus stupides et le moins éduqués possible ? Comment en est-on arrivés à un tel culte de l'ignorance dans une civilisation pourtant bâtie sur la connaissance ?
Évidemment cet exemple n'en est qu'un pris au hasard dans la longue série de ces évènements, qui savent susciter en moi un énervement et un mépris rarement éprouvés par le quasi-philanthrope que je suis (cf Tolérance), où des individus trouvent judicieux, pour se fondre dans la masse, de se faire passer pour encore plus stupides qu'ils ne sont.

Pour citer Desproges, que ça ne dérangera sans doute pas que je pille son gagne-pain de la sorte sans lui attribuer rétribution, maintenant qu'il est aussi mort qu'un poisson qui nage sur le dos : "La démocratie, c'est quand Lubitsch, Mozart, René Char, Reiser ou les batailleurs de chez Polac, ou n'importe quoi d'autre qu'on puisse soupçonner même de loin d'intelligence, sont reportés à la minuit pour que la majorité puisse s'émerveiller dès 20 heures 30, en rotant son fromage du soir, sur le spectacle irréel d'un béat trentenaire figé dans un sourire définitif de figue éclatée, et offrant des automobiles clé en main à des pauvresses arthritiques sans défense et dépourvues de permis de conduire."

Et bien que la masse des débilitants aille se faire foutre, et avec mes compliments. Ils ne m'enlèveront pas la fierté du peu de savoir et de maîtrise de la langue que j'ai. On ne m'ôtera pas de l'idée qu'il est beaucoup plus glorieux de réfléchir pour faire avancer la connaissance, ou tout du moins apprendre de ce ceux qui l'ont fait, que de marquer des buts sur un terrain de foot, ou de lancer un quelconque trait d'esprit pour se faire mousser dans une conversation. Oui, je suis un intello; non seulement je l'assume mais j'en suis fier, et je t'emmerde.

mercredi 9 janvier 2008

Couple et amour

Élevés que nous sommes à la grande école du romantisme© de chez Disney, on a trop souvent tendance à considérer amour et couple comme indissociablement liés. Je ne parle pas ici des histoires d'un soir, que la libération libidineuse et la gloutonnerie sexuelle de notre époque, que j'encourage par ailleurs, mêlés à une certaine vision de la virilité même chez la femme et à la peur du ridicule auront tôt fait de nous apprendre à éloigner le plus possible du sacro-saint Sentiment. Mais dès qu'il est question de durée et d'engagement, notre civilisation éprouve désormais systématiquement le besoin d'inclure le sentiment amoureux comme condition sine qua non.

Nos ancêtres médiévaux et antiques, de même que certains de nos contemporains régis par d'autres modes de fonctionnement, étaient en effet beaucoup moins imprégnés que nous de cette préoccupation. L'intérêt, la tradition et l'aval familial avaient en ces temps une importance prépondérante dès qu'il s'agissait d'union et de mariage. Je n'ai par ailleurs guère de problème avec notre nouveau dispositif, dont je préfère largement la naïveté mielleuse à l'arbitraire des mariages arrangés des temps passés. Mais elle m'inspire tout de même une réflexion quant aux différents aspects de ce sentiment par définition si abstrait, subjectif et aux manifestations si diverses, ainsi qu'à la place qu'il occupe dans un couple.

Bien souvent, les jeunes gens ne conçoivent l'amour que sous la forme de la passion amoureuse, où l'autre occupe de le centre de leurs préoccupations. Elle peut être à l'origine aussi bien des bonheurs les plus intenses que des détresses les plus douloureuses.
D'ailleurs, même si la passion amoureuse reste à mon goût une expérience essentielle de la vie, les ravages qu'elle occasionne en compensent bien souvent les agréments. On a tous en tête les émois douloureux de nos premières ruptures, ou l'image de ces gens qui s'enferment dans leur couple, se privant progressivement en son nom de presque tous leurs autres plaisirs extérieurs et de leurs amis.
Le quotidien de l'amoureux passionné est d'ailleurs souvent loin d'être si rose : on n'obtient pas toujours de l'autre toute la considération qu'on attend de lui, ou alors on est régulièrement rongé par une jalousie souvent même infondée. Même dans les rares cas où elle fonctionne et apporte réellement du bonheur à chacun des deux amoureux, elle finit presque irrémédiablement par s'effriter. Les préoccupations quotidiennes et extérieures reprennent leur droit, les sentiments évoluent.
La passion amoureuse est un stade important du développement de l'individu. Je suis convaincu que l'expérience qu'on en tire de certains plaisirs et de certaines douleurs nous est très utile dans le reste de notre existence. Mais dans les faits, il vient presque toujours un moment où elle ne suffit plus comme raison d'être à un couple. Les sentiments doivent alors mûrir, se raisonner, entrer dans une autre phase.

Cet autre type d'amour, qu'on conçoit, pour ce que j'en sais, plus facilement en prenant de l'âge, est plus éloigné de la conception romantique. Même si ça reste un sentiment, il prend autant ses racines dans notre raison que dans notre affect. On apprend à apprécier les qualités de l'autre et ce qu'il a à nous apporter, à identifier et supporter ses défauts, à organiser sa vie incluant l'autre, mais pas nécessairement en fonction de lui (ou d'elle).
Certains aspects restent très proche de la passion amoureuse, dont ce sentiment n'est parfois qu'une évolution. On peut toujours ressentir assez fortement la jalousie, être très affecté par le comportement de l'autre ou la peur de le/la perdre. Mais le monde ne tourne plus nécessairement autour de lui/elle, on reste ou on redevient bien conscient de sa propre individualité et de tous ses aspects qui n'ont rien à voir avec cette entité qu'est devenue le couple.
Malheureusement, cette conception aussi a ses revers. Lorsqu'il y a passage de l'état d'amoureux transi à ce rythme de croisière, la transition ne se fait pas toujours au même rythme chez les deux amoureux, pouvant occasionner un réel mal-être au moins chez l'un, voire souvent une rupture. Et même quand la transition se passe bien, il arrive que l'un des deux aille trop loin, qu'aveuglé par sa conception d'un amour uniquement passionnel, il/elle ne fasse plus la différence entre cet état et l'absence d'amour, et délaisse son/sa partenaire. C'est le cas typique du gars qui rompt avec sa nana sans en faire grand cas, puis qui déprime profondément lorsque celle-ci lui trouve un remplaçant. On n'est pas obligé de s'en rendre compte quand on est amoureux.

Selon moi, un couple qui se veut heureux et amoureux sur le long terme doit finir par en arriver à ce type d'amour.
Je pense que c'est pour ça que la sagesse populaire moderne a tendance à préconiser de ne pas se marier trop vite. Cette transition amoureuse rend le couple tellement fragile qu'il n'est pas sage de prendre le risque d'un engagement avant de l'avoir passée.

Évidemment, il y a le cas marginal de ceux qui continueront à brûler d'une passion inextinguible jusqu'à leur dernier jour. On en voit de temps en temps, des petits vieux qui se tiennent par la main, des parents de pote qui sont toujours inséparables malgré le poids des années de mariage et de l'âge.
Il y a aussi les couples sans amour, sans doute plus nombreux déjà, qui ne tiennent debout que par habitude ou par dégoût de la solitude. Ils ne seront d'ailleurs pas forcément évidents à distinguer de nos couples à l'amour mature.

Enfin n'oublions pas que le sentiment amoureux est rarement symétrique au sein d'un couple, et qu'il existe divers degrés aussi bien à la passion qu'à l'amour rationnel, et qu'il est loin d'être systématique que chacun en soit au même point au même moment. De même, l'ordre d'enchaînement n'est pas obligatoirement celui que j'ai évoqué, d'autant qu'une passion éteinte peut tout-à-fait être réveillée pour un temps.
Bref il existe autant de combinaisons qu'il y a de couples. C'est pourquoi l'accession au bonheur en couple passera au moins autant par la capacité à établir une relation adaptée que par le choix du partenaire idéal.

vendredi 4 janvier 2008

...et la lumière fut.

Ma seule et unique bonne résolution pour cette année 2008 a été de trouver le courage de rendre publique l'existence et surtout l'adresse de ce blog. J'ai en effet jusqu'ici entouré cet ouvrage d'un secret relatif, ne clamant pas sur les toits son existence et ne dévoilant son emplacement qu'à de rares élus.
Je dirais bien que c'était par modestie si j'avais une foi quelconque en cette soi-disant vertu qui n'est pour moi que l'enrobage hypocrite de la pire des vanités. En fait je pense qu'il s'agissait avant tout d'appréhension. Sachant qu'il est très difficile d'être objectif concernant le fruit de son propre labeur, je me sais inapte à juger de la qualité de mes écrits et donc de leur intérêt pour autrui. Ça me parait d'autant moins évident que la plupart des idées ou constats que je pose ici ne sont pour moi qu'un amoncellement de quasi-évidences. Partant de là, pourquoi ne le verrais-tu pas toi aussi comme tel ? Qu'est-ce qui empêchera alors ton attention de sombrer prestement au gré de mes formulations pompeuses ?

Mais ce blog est mon ode à la mégalomanie et à la prétention. Quel genre de prétentieux ferais-je si je conservais mes écrits dans l'ombre, à l'abri des critiques et des moqueries, mais aussi des éloges et compliments ? L'intérêt de ses articles réside tout autant dans le plaisir que me procure leur rédaction que dans l'envie que j'ai d'en faire connaître les contenus.
Je te le laisse maintenant, lis-le, moque-t'en ou apprécie-le, ou pire encore arrête-toi là et jette-le négligemment au fond d'un tiroir de ton indifférence.

Je te recommande, si tu ambitionnes de tout lire et si tu te sens un intérêt quelconque pour le cheminement de mes pensées, de commencer par le début tout en bas de la page Septembre, puis de remonter petit à petit (les articles sont classés par ordre antichronologique, dans la plus pure tradition bloguesque). J'ai fait en sorte de dévoiler dès les premiers articles les bases de mes réflexions, qui servent de fil conducteur au reste de mes raisonnements.
Cela dit, la plupart des articles sont parfaitement indépendants et peuvent être classés en catégories distinctes regroupés dans l'"article-sommaire". Sois libre d'y piocher à ta guise.

Tant que je t'ai sous la main, je vais profiter de cet article qui n'a d'autre but que de te parler pour éclaircir quelques points.

Tout d'abord, tu auras remarqué que le nombre d'articles a considérablement diminué sur les deux derniers mois. N'y vois pas un signe de découragement de ma part. C'est juste que la rédaction d'un article me prend en règle générale plusieurs heures. J'ai été assez occupé et, ce blog n'étant pas vraiment ma priorité, je me suis laissé un peu dépasser par mes différentes activités. Je prends néanmoins toujours autant de plaisir à rédiger mes articles et je suis loin d'être à court d'idées (j'ai au moins une page de fichier texte remplie de thèmes d'articles à écrire, à raison d'un par ligne, et ça augmente sans arrêt). J'espère pouvoir revenir sous peu à un rythme d'une dizaine d'articles mensuels.

Je tiens à préciser également que je ne lis, pour ainsi dire, pas de blogs. Je ne créé pas le mien en copiant sur qui que ce soit, ni en m'inspirant d'un autre existant. Je ne sais donc pas vraiment si la démarche que j'ai adoptée est originale ou si, comme je le suppose, il existe des millions d'autres blogs au moins aussi réussis que le mien et suivant le même concept.
J'ajouterai que les derniers textes de philosophie auquel j'ai touché remontent aux quelques cours de cette matière qui m'ont été dispensés en terminale S, il y a de cela déjà quelques années. Cela m'expose au risque que quelqu'un ait pu formuler ces réflexions avant moi sans que j'en aie forcément connaissance, qu'il s'agisse d'un philosophe, d'un scénariste de série télé, d'un autre blogueur, ou même de toi, cher lecteur.
Mais les raisonnements et principes développés ici l'ont été par moi, et lorsque je réutilise sciemment la pensée d'un autre, je mets un point d'honneur à le signaler.

Je conclurai sur des perspectives d'avenir. En effet, j'envisage d'"inaugurer" prochainement deux nouvelles catégories d'articles. La première consistera en d'odieux pillages où je détaillerai les quelques concepts développés par des anonymes de mon entourage qui, bien que n'étant pas de mon cru, m'ont paru assez géniaux pour que je les intègre à ma propre pensée et qui ont donc leur place ici. Dans la seconde, "L'avocat du Diable", je défendrai bec et ongle des points de vue que je ne partage absolument pas, me mettant à la place de ceux qui seraient mes adversaires dans un réel débat d'opinion et illustrant ainsi qu'on peut justifier à peu près tout et son contraire.